Définition de SIEN, SIENNE

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : siin, si-è-n' ; au masculin, l'n se lie quand sien précède son substantif : un siin-n ami ; l'n ne s

DÉFINITIONS

1
Avec l'article, le, la, les.
Avez-vous un secret important ? versez-le hardiment dans ce noble coeur : votre affaire devient la sienne par la confiance
Nos écrits sont mauvais ; les siens valent-ils mieux ?
Il [Montfort] travaillait depuis un temps à l'histoire de la géométrie ; chaque science, chaque art devrait avoir la sienne
Héliogabale alla jusqu'à vouloir détruire tous les objets de la vénération de Rome, et ôter tous les dieux de leurs temples pour y placer le sien
L'évêque de Luçon, fils du célèbre Bussy, m'a dit qu'ayant demandé à M. de Meaux quel ouvrage il eût mieux aimé avoir fait s'il n'avait pas fait les siens, Bossuet lui répondit : les Lettres provinciales
Je voudrais en fait de belles lettres qu'on fût de tous les pays, mais surtout du sien
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Mél. litt. Cons. à un journaliste.
Plus heureuse que son ancienne amie, elle [Ninon] ne se plaignit jamais de son état, et Mme de Maintenon se plaignit quelquefois du sien
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Mél. litt. sur Mlle de l'Enclos.
2
Il s'emploie sans article, et signifie à soi.
Ainsi ce rang est sien, cette faveur est sienne, Et je n'ai rien enfin que d'elle je ne tienne
Dans ce penser, il [l'âne] se carrait, Recevant comme siens l'encens et les cantiques
Dieu prodigue ses biens à ceux qui font voeu d'être siens
Mais surtout fais si bien, Qu'elle garde toujours l'ardeur de me voir sien
Arnauld prétend que la doctrine de Malebranche n'est ni nouvelle ni sienne
3
Sémantique : Familièrement, avec l'article un, une.
Resté seul au palais avec un sien esclave
de DESMARETS dans Mirame, IV, 1
Un sien ami, voyant ces somptueux repas, Lui dit....
Au lieu de un, une, on met parfois quelque.
Que, déguisant son coeur et cachant sa famille, Il avait fait merveille aux guerres de Castille, D'où quelque sien voisin, depuis peu de retour, L'avait vu plein de gloire et fort bien à la cour
4
Nature : S. m. Le sien, son bien.
Ne point mentir, être content du sien, C'est le plus sûr....
Il [d'Aubigné] appelle Henri IV le conquérant du sien ; éloge qui renferme, ce me semble, en deux mots toute la justice de sa cause, et toute la gloire des autres conquérants
de Mme DE CAYLUS dans Souvenirs, p. 8, dans POUGENS
Qui donne de l'encens ne donne rien du sien
de LA CHAUSSÉE dans Gouvernante, I, 3
Si vous avez le plaisir de quereller, il faut bien que de mon côté j'aie le plaisir de pleurer ; chacun le sien, ce n'est pas trop
Bornez-vous à votre lot ; Chacun le sien n'est pas trop
de PANNARD dans Oeuvr. t. III, p. 347
Sémantique : Fig. Mettre du sien dans une affaire, y contribuer de son argent, de sa peine, de son imagination.
Ce cavalier en était toujours [des collations, divertissements, etc.] ; et c'était un grand hasard quand il n'y mettait pas quelque chose du sien, pour surprendre agréablement par quelque trait de magnificence et de galanterie
Il [Méry] n'a rien mis du sien dans sa réputation que son mérite
Il est entouré de mille volumes, et il en compose un où il ne met rien du sien
La comtesse : Mais surtout que personne.... - Suzanne : Ah ! Figaro ! - La comtesse : Non, non, il voudrait mettre ici du sien
Sémantique : Familièrement, mettre du sien, ajouter à un récit des détails imaginaires. Il a mis du sien dans cette histoire.
Le prince n'a point assez de toute sa fortune pour payer une basse complaisance, si l'on en juge par tout ce que celui qu'il veut récompenser y a mis du sien
de Jean de LA BRUYÈRE dans IX.
Ajouter du sien à un texte, y ajouter des choses qui n'appartiennent pas à ce texte.
Quoi qu'il en soit, je le prends au mot [Burnet rétractant un passage de son livre], et je le loue de désavouer de bonne foi ce qu'il dit que son traducteur avait ajouté du sien
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Déf. Var. 1er disc. 22
5
Nature : Au pluriel, tous ceux qui sont en relation avec celui dont on parle, à quelque titre que ce soit (parents, descendants, héritiers, soldats, domestiques, partisans).
Pour être mieux reçu [d'un jésuite], je feignis d'être fort des siens
Mais un reste des siens, entourés dans leur fuite,....
T'a-t-il de tous les siens reproché le trépas ?
Antoine [père de Henri IV], mandé dans la chambre de François II, fut averti, à la porte, par un des siens, du complot formé contre sa vie
6
Dans le langage de l'Écriture, les siens, en parlant de Dieu, ceux qui se consacrent, se dévouent à lui. Dieu connaît les siens.
Il ne faut point espérer d'être du nombre des siens, si l'on n'est résolu d'en faire hautement profession
de Louis BOURDALOUE dans Resp. humain, 2e avent, p. 374
7
Sémantique : Familièrement, au féminin pluriel. Faire des siennes, faire des fredaines, des folies, des tours, soit de jeune homme, soit de fripon.
S'il pense ainsi faire des siennes, à la fin je ferai des miennes
de Paul SCARRON dans Typh. I
Vaudemont avait quitté le service de France, et faisait des siennes dans ses terres
Oui, comme un petit fripon, Qui de temps en temps fait des siennes
de IMBERT dans Jaloux sans amour, V. 8
Sémantique : Fig.
J'ose dire qu'encore qu'au siècle où nous sommes, la fortune fasse bien des siennes, elle ne sera pas si folle que de se commettre avec un mérite comme le vôtre
de Paul SCARRON dans Epît. Dédic. Oeuv. t. I, p. 152, dans POUGENS
Je vous dirai que l'amour fait ici des siennes
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans à Bussy, 23 déc. 1682
Le tonnerre a fait des siennes, en attendant le canon : il est tombé sur le chevalier de la Luzerne, qui était à la tête de sa troupe ; il a brûlé ses habits et sa culotte, sans lui faire beaucoup de mal

HISTORIQUE

1
XIe s.
Que l'emperere nessun [aucun] des soens n'i perde
dans Ch. de Rol. LXIII
Estramariz i est, uns soens compains
dans ib. LXXIV
2
XIIe s.
Et je sui si siens quites ligement, Que tout [elle] me puet ou engager ou vendre
dans Couci, V
[Je] Merci amour, de ce qu'ele me deigne Tenir à sien..
dans ib. IX
Car qui le sien done retraiament [de manvaise grâce], Son gré en pert...
dans ib. XVI
3
XIIIe s.
Et uns siens chevaliers fu montés à cheval, qui avait nom Nicoles le Jaulain
Un jour estoit rois Flore à un sien grand manoir
dans Berte, LXV
Chascune [dame] cuide k'il soit siens [un amant] ; Si s'en fait molt jolie et cointe
dans Lai d'Ignaurès
Nus [nul], par reson de garde ne par reson de bail, ne pot faire siens les fruis des vilenages
de Philippe de BEAUMANOIR dans XXI, 10
4
XIVe s.
Se Diex reprent çou qui est sien, Encontre nous ne mesfait rien ; Tout sommes sien....
de J. DE CONDÉ dans t. II, p. 159
Et s'il est ainsi que les siens [ses concitoyens] se repentent et s'ennuient de son gouvernement
de Pierre BERCHEURE dans f° 24, recto
5
XVe s.
Jean Lyon.... se tenoit en sa maison, et vivoit du sien
Et prirent leurs haches, et se commencerent de haches à combattre et à donner grands et horribles horions, et chacun avoit le sien
L'on doit faire servir le sien, Non pas qu'homs ou femme s'asserve à son avoir....
de Eustache DESCHAMPS dans Poésies mss. f° 553
Manda au duc de Bourgogne qu'il vint, et qu'il pouvoit estre seur que la ville estoit sienne
de Philippe de COMMINES dans III, 10
Font des exactions indues à la grande charge du peuple et à leur profit particulier ; et, pour abreger, sont detruits de tout, et qui perd le sien perd le sens
de Charles Pinot, sieur DUCLOS dans Preuv. de Louis XI, p. 289, dans LACURNE
6
XVIe s.
Estre toujours recors de la dignité et magnificence tant sienne que de ses ancestres
de SLEIDAN dans f° 5
Malheureux est celuy qui, pendant qu'il est sien, Qu'il sent, qu'il voit, qu'il oyt, qui ne fait bonne chere
de Pierre de RONSARD dans 707
Cette sienne resolution arresta sus bout la furie de son maistre
de Michel de MONTAIGNE dans I, 2
C'est le cours du monde, c'est nature qui faict des siennes

ÉTYMOLOGIE

1
Berry, sen, senne ; saintong. son : o n'est grain tout son, ce n'est pas tout sien. Voy. MIEN (l'opinion que mien, tien, sien sont des formes diphthonguées de mon, ton, son, ou men, ten, sen, appartient à M. Baudry).